Les 4 étapes du processus d’apprentissage appliqué à l'entrée des certifications qualité dans la formation

Pour marquer les 4 périodes de l’entrée de la certification qualité dans le système de la formation continue en France, voici 4 articles qui appliquent à chaque période une des étapes du processus d’apprentissage :

- De juillet 1971 à mars 2014 : des professionnels inconsciemment incompétents. Je ne sais pas ce que je ne sais pas. Pourquoi aller vers la certification dans un marché florissant ?

- De mars 2014 à septembre 2018 : des professionnels consciemment incompétents. Je sais ce que je ne sais pas. Quel est le chemin ves la certification qualité à l'ère du Data-Dock ?

- De septembre 2018 à janvier 2021 : des professionnels consciemment compétents. J’évolue dans mes pratiques, et je sais que ça se voit. Comment obtenir ma certification qualité ?

- De janvier 2021 à la prochaine réforme de la formation : des professionnels inconsciemment compétents. Je le fais parce que je sais le faire. Comment garder ma certification qualité ?

Etape 1

Période : de juillet 1971 au mars 2014

Références juridiques : pas de cadre réglementaire sur la qualité en formation dans cette période

Nous, professionnels de la formation, inconsciemment incompétents…

Le marché de la formation, dans sa phase embryonnaire, a vu le jour aux lendemains de la loi de 1971. Une définition légale de l’action de formation vient d’être arrêtée. Les professionnels de la formation, alors qualifiés de « dispensateurs de formation », conçoivent et animent les formations conformément à un cahier des charges : le programme de formation. Juridiquement, la prestation est formalisée dans une convention de formation. La feuille d’émargement atteste de la présence des apprenants afin de déclencher la prise en charge financière.

A cette période, ce sont les FAF (fonds d’assurance formation) qui assurent le financement après s’être surtout assurés que les entreprises des salariés bénéficiaires ont acquitté leur contribution financière.

Les entreprises ne sont que dans « la petite enfance de l’art » du développement des compétences. En même temps, le code du travail impose surtout la participation au financement du développement de la formation. L’objectif était avant tout, avec leurs contributions financières, de développer la formation dans les entreprises.

Plus tard, la loi du 5 mai 2004 catégorisera les actions de formation par finalité : adaptation au poste, maintien dans l’emploi et développement des compétences. Mais dans la très grande majorité des entreprises, on continuera de parler de gestion de la formation et non pas de développement des compétences.

Pour les professionnels de la formation, la qualité est aussi très administrative. En effet, comme aujourd’hui, la conformité d’un dossier formation garantit son financement. Comme aujourd’hui, la satisfaction client sera mesurée à partir des évaluations de satisfaction. Celle-ci portera sur des sujets aussi variés que les conditions d’accueil des apprenants, le professionnalisme du formateur, le respect du programme de formation...

Cela ne signifie pas que la qualité des formations perçue par les clients prescripteurs, les apprenants ou les financeurs était mauvaise. Au contraire, les questionnaires de satisfaction des formations dispensés ont toujours été plus que satisfaisants.

Dans ce contexte, pourquoi, pour les prestataires et formateurs, viser encore plus de qualité lorsque les retours des apprenants sont déjà globalement très bons ? D’ailleurs, pour le client, la priorité est ailleurs. Il s’agissait donc d’abord et toujours de développer la formation… au risque de la cantonner dans une activité de gestion administrative et financière. Ce sont donc les moyens financiers qui primeront : on négocie plus de budget, plus de fonds mutualisés au service pour des plans de formation ouverts à plus de salariés.

… évoluant dans un marché florissant

En France, au début des années 2000, les bilans pédagogiques et financiers* identifient environ 40000 prestataires de formation pour 15000 stagiaires. Les premières certifications qualité apparaissent mais seuls les « gros » organismes de formation s’y intéresseront. Compte tenu de leur clientèle, des entreprises de grande taille, elles-mêmes déjà engagées dans des démarches qualité, présenter une certification qualité constitue un avantage concurrentiel, voire une condition d’accès à un marché. C’est l’apanage des prestataires de formation certifiés.

Dans l’ère de la qualité en formation non règlementée, appliquée au processus d’apprentissage des adultes, les professionnels de la formation « ne savent pas qu’ils ne savent pas ». Pourquoi s’encombrer d’une démarche qualité ? Pourquoi viser une certification, poser des procédures dans un marché florissant et qui ne cessera de croître ?

Les FAF, depuis 1995, ont cédé leur place aux OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés) pour qui les entreprises ne sont plus de simples cotisants mais des « clients » à qui l’on propose un accès aux fonds mutualisés à toutes celles qui porteront d’ambitieux plans de formation.

De 2000 à 2016, le nombre de prestataires augmentera de 70%, passant de 40000 à 68000** organismes et formateurs disposant d’un numéro de déclaration d’activité. Toujours sur la base des bilans pédagogiques et financiers déclarés sur cette même période, le chiffre d’affaires du marché de la formation augmentera de près de 100%, passant d’environ 7 mds à un peu plus de 14 mds d’euros**.

Les flux financiers, dans le champ de la formation continue, donnent le tournis sur un marché dans lequel on entre à partir d’une simple déclaration d’activité. L’opacité et les risques de dérives financières, proportionnels aux volumes financiers, sont pointées dans plusieurs rapports d’organismes d’Etat. En 2008, un des rapports de la Cour de la Compte qualifiera le système de formation de corporatiste, cloisonnée et complexe.

Les années suivantes, plusieurs rapports souligneront la nécessité d’une régulation financière du système de formation.

L’article 8 de la loi du 5 mars 2014, et le décret du 30 juin 2015, poseront les bases de l'ère de la qualité des formations, au sens règlementaire.

 

*Le bilan pédagogique et financier (BPF) est une déclaration obligatoire que les prestataires de formation doivent remplir et transmettre chaque année à la Direccte. Désormais renseignée dans sa version numérique, le BPF présente la nature (actions certifiantes, non certifiants, VAE...) et le volume d'activités (nombre d'heures dispensées, profil et nombre de stagiaires, domaines de formation, produits et charges...) des prestataires. 

** Source : Jaune Budgétaire 2019