On a beaucoup écrit sur l’évaluation de la formation, mais en France, notre système de la formation professionnelle nous cloisonne dans une approche excessivement administrative. A chaque quinquennat son président qui reconstruit notre microcosme de la formation, un club ultra privé qui n’invite à chaque fois que les mêmes contributeurs pour préparer la énième loi sur la formation. Avec toujours les mêmes constats d’insatisfaction.
Pour innover en formation, prendre de la hauteur sur le réglementaire
Il faut rassurer les financeurs, les prescripteurs et … la Cour des Comptes*, alors on réglemente encore et encore.
· On mise, entre autres, sur l’évaluation de satisfaction dont on rappellera qu’elle est pourtant déjà présente dans les textes depuis des décennies dans la définition même d’une action de formation : Les actions de formation professionnelle mentionnées à l'article L. 6313-1 sont réalisées conformément à un programme préétabli qui, en fonction d'objectifs déterminés, précise les moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement mis en œuvre ainsi que les moyens permettant de suivre son exécution et d'en apprécier les résultats. Art. L 6353-1 du Code du Travail.
· Le 6ème critère du décret du 30/06/2015 (issue de la loi du 5/03/2014) sur la capacité du prestataire de formation à assurer une formation de qualité cite « la prise en compte des appréciations rendues par les stagiaires ».
· L’indicateur 6.1 du référentiel des financeurs paritaires, que l’on retrouve sur le data-dock, référence les prestataires sur leur « capacité à produire des évaluations systématiques et formalisées des actions de formation auprès des stagiaires » et pointe en question clé la formalisation de l’évaluation de la formation auprès des stagiaires.
Les référentiels des organismes de certification ont allègrement repris les 6 critères du décret qualité pour être inscrits sur la liste du CNEFOP. A leur décharge, les certifications et labels qualité visent la satisfaction client en attestant de la conformité du système de management de la qualité du prestataire.
Nous installons donc les apprenants dans une posture de consommateurs alors même que souvent la formation à laquelle ils participent leur a été prescrite. En tant que prestataires ou acheteurs, on s’accommode des taux de satisfaction qui dépasse les 90% en oubliant que l’on peut espérer davantage d’une formation, certifiante ou non, qu’elle soit à destination de salariés ou de demandeurs d’emploi.
Pour des apprenants acteurs du développement de leurs compétences
En bas des CV des salariés et des demandeurs d’emploi, soucieux d’actualiser leurs connaissances, apparaissent parfois les formations qu’ils ont suivies. Peut-être pourrait-on afficher en haut de ces mêmes CV, les compétences qu’ils ont développées en situation de travail à l’issue de ces mêmes formations.
C’est donc ce que à quoi les formations devraient aussi contribuer, parce que c’est ce que recherchent les employeurs. Des compétences. Plus que des certifications.
Les articles de cette série sur le thème « Innover en formation, après le décret qualité : l’évaluation de la formation » (Article 1 et Article 2) plaident pour une révision des processus de formation actuels des prestataires de formation. Parce qu’aujourd’hui, ces processus prennent fin à la remise d’une attestation de fin de formation, après la traditionnelle évaluation de satisfaction.
Il a aussi été mis en avant l’importance pour l’apprenant d’être acteur du développement de ses compétences, en s’engageant véritablement dans la formation, quand bien même celle-ci serait prescrite. Cet engagement ne peut évidemment être fondé que sur la base du volontariat.
En effet, sa seule présence en formation, attestée par la feuille d’émargement, n’est pas suffisante. Finalement, deux situations intéressantes se profilent :
- Celle de l’apprenant qui participe activement à la formation, dont la satisfaction sera exprimée dans le formulaire d’évaluation adhoc. Il lui sera remis une attestation de fin de formation. Il ne mettra pas forcément en application ce qu’il aura acquis en formation ou n’en aura peut-être pas conscience.
- Celle de l’apprenant qui s’engage activement dans la formation, et qui en retirera des compétences. Il lui sera remis une attestation de compétences. Il aura appris à analyser, voire favoriser, les situations de travail dans lesquelles il appliquera les acquis de sa formation. Et il en aura conscience.
A l’heure où les financeurs participent à l’expérimentation de la formation en situation de travail (FEST), il nous semble intéressant d’expérimenter une nouvelle voie en formation avec des prestataires, formateurs et apprenants engagés. Entre professionnels de la formation, on souhaite donc aller plus loin et nous entreprenons donc une expérimentation à laquelle les plus motivés d'entre vous sont les bienvenus.
Projet d’expérimentation : une méthodologie en 3 temps
L’objectif de cette expérimentation est d’identifier les conditions et modalités de transfert en situation de travail par l’apprenant et de manière autonome les apports d’une formation. Il lui appartiendra de développer lui-même ses compétences en situation de travail qu’il fera attester par le prestataire de formation.
*Charte Qualité Compétences : engagement de l’organisme de formation et du formateur de respecter l’accompagnement dans son développement des compétences, avant, pendant et jusqu’à 3 mois après la formation. Engagement de l'apprenant volontaire d’œuvrer au développement de ses compétences. Les 2 parties s’engagent dans des obligations de moyens.
Pour rejoindre l’expérimentation « Innover en Formation »
Le calendrier d’ouverture de l’expérimentation se mettra en place début 2018. D’ici là, les questions et candidatures des prestataires (présentation de l’organisme et motivations à entrer dans l’expérimentation) peuvent être envoyées à contact@qualif.fr
Il vous sera envoyé en retour un dossier qui vous présentera ce à quoi cette expérimentation vous engage en tant que prestataire, mais également pour vos formateurs et apprenants.
Si vous confirmez votre engagement pour cette expérimentation, vous bénéficierez d’un accompagnement pour la mise en application (kit du prestataire + classes virtuelles), avec des retours d’expériences d’autres professionnels de la formation également engagés dans la démarche.